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15 avril 2025

Présidentielle 2025 : comme un péril démocratique

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En attendant la proclamation officielle des résultats par la Cour constitutionnelle, la présidentielle du 12 avril dernier a rendu son verdict. Sans surprise aucune, celui-ci a quasiment viré au plébiscite du candidat du Rassemblement des Bâtisseurs, Brice Clotaire Oligui Nguema, lequel selon les résultats communiqués par le ministère de l’Intérieur, a obtenu plus de 90% des suffrages des Gabonais qui se sont rendus aux urnes accomplir leur devoir civique.

Au-delà du satisfécit que peut légitimement manifester le camp des vainqueurs, tout bon démocrate devrait plutôt s’interroger sur le danger d’un possible péril démocratique dans notre pays avec ce score à la soviétique de plus de 90%. On croirait faire un bond en arrière à l’époque du parti unique d’Albert Bernard Bongo. Dans un pays sérieux, un score de cette nature aurait dû faire réagir la classe politique et les intellectuels pour alerter de la dangerosité que peut constituer une telle victoire dans un système démocratique. Evidemment personne parmi ces deux composantes sociales n’est prompt à donner son avis. Les uns et les autres attendant d’être possiblement appelés par le nouveau maître du Gabon pour figurer dans les prochains gouvernements ou compter parmi les personnalités à venir de premier plan.

Au nom des intérêts et des positionnements stratégiques en vue de l’obtention d’un strapontin, toute la classe politique ou presque a fait corps pour chanter les louanges à la gloire du « général » finalement porté à la magistrature suprême, comme le plus grand nombre le souhaitait, les pédégistes y compris.

Bien que le PDG ait mis le pays en coupe réglée, il a battu le rappel de ses militants pour aider le chef du CTRI à obtenir le pouvoir « démocratiquement ». Alors que ses anciens camarades chantaient les louanges de leur bourreau du 30 août 2023, le dernier Premier ministre d’Ali Bongo portait sur lui tous les péchés d’Israël. Au point que le peuple, sans avoir une autre alternative pour faire payer au PDG le rôle qu’il a joué pour abuser de la confiance des Gabonais, a trouvé en Alain-Claude Bilie-By- Nze le parfait bouc-émissaire. Gageons simplement que lors des prochaines locales, ce même peuple se rappellera les exactions commises par ces tortionnaires pour être cohérent avec lui-même en sanctionnant les représentants de ce parti qui seront présentés dans les prochaines élections. Sinon, on se fera à l’idée qu’il y avait quelque chose de personnel contre le natif de Ntang-Louli.

Maintenant que l’élection d’Oligui à la tête du pays a été actée, comment vont désormais s’organiser les contre-pouvoirs pour maintenir un certain équilibre institutionnel dans un environnement politique marqué par un unanimisme sans précédent ?

Cette question, loin d’être dépourvue de bon sens, vaut son pesant d’or. Car dans un pays qui se veut démocratique, l’équilibre des pouvoirs agit comme les fondations d’un édifice sans lesquelles l’édifice peut s’écrouler à la première tempête. Ainsi que le formule fort justement Montesquieu dans l’Esprit des lois : « Pour lutter contre l’arbitraire, il faut que par les dispositions des choses le pouvoir arrête le pouvoir. »

Ce plébiscite du général Oligui, le premier du genre depuis le retour du multipartisme, loin d’être symptomatique de la vitalité de notre démocratie, constitue plutôt une véritable entorse à celle-ci. A la limite, il faut le voir comme l’ouverture d’une parenthèse autocratique 35 ans après la vague de démocratisation des pays africains francophones notamment. Une vague de démocratisation qui avait mis fin aux régimes présidentialistes des années 60 faussement mis en place au nom des impératifs de construction nationale.

A l’épreuve des faits, on s’est rendu compte que cela n’était rien d’autre qu’une ruse des tenants du pouvoir pour se maintenir le plus longtemps possible au sommet de l’Etat. Trente-cinq ans après l’instauration du multipartisme sans réelle démocratie, n’est-il pas temps de faire l’état des lieux de la réinstauration de ce système politique dans notre pays ? L’on est enclin à se demander si tous ces processus électoraux ont véritablement contribué à la consolidation de notre démocratie ou bien tout cela n’aurait été pour ainsi dire qu’une façade permettant à l’oligarchie compradore en place de se maintenir au pouvoir.

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