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Libreville
12 juillet 2025

Réforme des partis : moralité politique ou volonté démocraticide ?

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Le 17 juin dernier, l’Assemblée nationale de transition gabonaise a adopté la nouvelle loi sur les partis politiques. Mais le texte qui fixe désormais, entre autres conditions, un minimum de 12000 adhérents pour créer un parti politique est déjà largement décrié comme une volonté voilée d’un retour en force au monopartisme, pourtant enterré au lendemain de la conférence nationale de 1990.

Démocraticide, démocrature, retour à la pensée unique, les leaders, tous bords confondus, n’ont pas des termes assez durs pour fustiger la nouvelle loi électorale voulue par les autorités gabonaises en vue, expliquent-elles, de réguler l’espace politique du pays. Et pour cause, le nombre des adhérents. Initialement fixé à 18000 lors du dialogue national d’avril 2024, il a été revu à 9000 avant d’être porté à 12000 par l’Assemblée nationale qui a adopté le texte à la hussarde le 17 juin dernier. Outre le nombre d’adhérents, les partis politiques, pour exister, devraient également justifier d’un certain nombre d’élus nationaux et locaux. Il faudra également disposer d’un certain nombre d’élus nationaux et locaux. En attendant la décision du Sénat, qui ne devrait certainement pas apporter un coup d’éclat, dans l’opposition, des voix s’élèvent pour critiquer le projet du gouvernement qu’on accuse de tuer le pluralisme politique, mieux, de ressusciter le vieux démon du parti unique que le Gabon avait pourtant déjà enterré au lendemain de la conférence nationale de 1990.

La sociologie politique

En voulant régenter ainsi au pas, l’espace politique, sans examen préalable de la sociologie politique même du pays, il semble que les autorités en place se soient fixé commecomme dessein funeste, peut-être sans le savoir, de tuer cet acquis de la conférence nationale qu’est le pluralisme, même de façade depuis plus de 30 ans. Car, au Gabon comme partout en Afrique, les notions d’idéologie ou encore de projet de sociétés qui caractérisent les partis politiques n’ont pas toujours été suivies par les populations, disons les électeurs qui votent essentiellement pour la personnalité, et même pour la région ou l’ethnie que pour autre chose. Surtout que les électeurs d’un candidat ne sont pas toujours des adhérents de son parti et vice versa.

Le tracing des adhérents, une méthode liberticide

En fixant des règles aussi rigides pour la création d’un parti politique au Gabon, les initiateurs de cette loi semblent ignorer une réalité bien locale, à savoir qu’en dehors du parti au pouvoir qui dispose de tous les leviers d’argent et du pouvoir de nomination, pour drainer autant de monde, des militants de circonstance serait-on tenté de dire toutes les autres formations n’ont souvent qu’une existence très marginale. Et l’exemple du PDG devrait servir de cas d’école. Dans ce contexte d’adhésion calculée, exiger des règles aussi drastiques, c’est engager une entreprise d’exclusion ou d’effacement d’autres appareils. Surtout avec cette obligation de fournir les numéros d’identification personnelle de chaque adhérent. Un tracing qui ne ferait qu’accentuer la crainte des représailles dans cette sorte de démocratie à la traque. Ce qui, immanquablement, devrait assécher les autres partis et entraîner la fin du multipartisme tel qu’on l’a connu jusqu’ici. A moins que ce soit une stratégie calculée en filigrane de cette réforme des partis politiques. Ce qui serait une volonté démocraticide sous le paravent d’une morale politique au forceps.

Leno Koleba

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