Quartier Pk8, 10 septembre, il est 23 heures chrono. La circulation routière est moins intense comme en mi-journée. Dans les différents bars qui brassent une clientèle hétéroclite, l’alcool coule à flot, y compris la drogue, cela, sous un torrent de décibels poussés à fond.
A y regarder, la vie, me semble-t-il, n’a plus aucun sens d’être vécue ; la clientèle se livre à une libation excessive, c’est comme si elle s’était donné rendez-vous en ces lieux pour un suicide collectif à l’instar de ceux pratiqués par certaines confréries lucifériennes.
Véritables déchets sociaux aux mœurs dissolues qui, chaque soir, traînent par là.
Au même moment, comme happée par la débauche ambiante des lieux, une malade mentale, vêtue d’une tunique sans doute noircit par l’usure et tout en lambeaux, passe, silencieuse, par là. Le regard éteint. Une vraie loque qui n’a plus rien d’humain en elle, seul l’instinct animal l’accroche encore à la vie.
L’atmosphère surchauffée à bloc, rythme l’ambiance folle à l’intérieur des bars. A l’extérieur, une bataille rangée éclate et oppose jeunes kobolisés piqués à vif. Sans doute des clients de ‘’Medellin’’, lieu de débauche tenu par des jeunes dealers adeptes de Pablo Escobar et qui attire non seulement drogués mais également braqueurs et prostitués, juste situé dans les parages et qui écoule drogues dures, amphétamines et chanvre indien.
Telle une horde de chiens errants enragés, ils s’échangent des coups violents assortis de roulades. Les cris de détresse de ceux venus les séparer, eux aussi kobolisés et aux yeux grisés par l’alcool, sont à peine audibles.
A croire que la meute est attirée chaque soir en ces lieux par une entité maléfique. Car chaque soir ou presque, en effet, des rixes ont lieu. Constatent les riverains.
C’est après un quart d’heure d’échanges de coups et de postillons, qu’on a réussi à calmer les ardeurs.
Dans cette confusion généralisée, on aurait cru un espace de non droits, voire une sorte de ‘’Zone Autonome Temporaire’’, investit par des flibustiers, qui, en l’absence de toute autorité, occupent le territoire pendant un laps de temps avant de disparaître, ainsi que le décrit ci-bien l’Américain Peter Lamborn Wilson dit Hakim Bey dans son essai la ‘’TAZ’’.
On a frôlé le pire ce soir du 10 septembre au PK8, un quartier classé par la police judiciaire ‘’zone-rouge’’ où l’insécurité est devenue endémique.
Tels des fantômes flottant dans le néant absolu, le regard perdu dans le vide, des bouteilles de bières à demi vides aux mains, c’est comme si rien ne s’était passé cette nuit-là, trainaient encore en ces lieux comme des rescapés d’un monde disparu, avec l’espoir que les tenancières garderont les bars ouverts afin de prolonger l’orgie éthylique.
Ghoze Lucifera
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