Dans sa toute dernière sortie, l’ancien Premier ministre Alain Claude Billie By Nze, avait, face à la presse, fustigé l’autochtonie, une menace à la culture du mérite. La compétence et le mérite devraient être les seuls critères de cooptation pour accéder à des fonctions publiques. Malheureusement, même sous la 5ème République, les schémas demeurent les mêmes. On nomme untel parce que originaire de telle région.
A peine passée la vague d’euphorie et d’émotion suscitée par l’arrivée du nouveau pouvoir, voilà que s’installent petit à petit le doute, le désenchantement et le désespoir. On peut le lire dans les yeux de nombreux Gabonais. C’est comme si la malédiction céleste était en train de s’abattre sur le pays et amorcer le crépuscule de tous les aménagements apportés par l’actuel régime.
Mines serrées, désinvolture à peine voilée, attitudes austères gagnent désormais ceux qui, hier, encensaient avec un zèle militant le coup de force du 30 août dont l’anniversaire sera célébré dans quelques jours dans le chef-lieu de la province de la Nyanga.
Les Gabonais sont constipés. Ils deviennent moins bavards ; les commentaires passionnés sur le coup dit de ‘’libération’’ s’éclipsent à petit feu. Les échanges de comptoirs qui se résumaient en un hymne aux Comité de transition pour la restauration des institutions (CTRI) et sa charte qui avait tout d’un manifeste idéologique, sont en train de foutre le camp. Eh oui les Gabonais sont constipés, la grogne est palpable, il leur faut rapidement une purge réparatrice avant qu’ils ne craquent faute de thérapie!
Cherchez l’erreur, vous y trouverez dans les conseils des ministres. A chaque nomination, le chef du département, bêtement, s’empresse de promouvoir des parents aux fonctions les plus emblématiques, faisant fi des erreurs de casting. Etat des services et compétence avérés ou non, on s’en tape. ‘’J’ai été nommé ministre de quelque chose, j’embarque mes parents du village avec moi’’. Ainsi parle le parfait parvenu de merde. Au diable l’expérience et la compétence devenues pourtant le credo avec l’avènement de l’actuel régime.
Si le Président Brice Clotaire Oligui Nguema veut tirer son épingle du jeu, un déclic s’impose dans le choix des patrons qui, outrageusement, occupent des postes importants du fait de leurs filiations ethniques ou régionalistes. Car, » Mal nommer les choses, c’est ajouter aux malheurs du monde (Albert Camus)« . Sinon, s’il n’y a pas un recadrage, à l’allure où vont les choses, certains départements ministériels risqueraient de ressembler aux gouvernements équoito-guinéens, chez le neveu de El sanguinero Macias Nguema Biyogho Nyeré Ndong où l’équipe gouvernementale est truffée à 99,99% que des fang de la tribu Essangui).
Loin pour moi de faire une fixation sur les uns ou les autres, je profite simplement de cette tribune à moi offerte pour appeler à migrer vers un paysage administratif dépoussiéré des oripeaux et autres miasmes contre-productifs, afin que la culture du mérite soit de mise.
A l’arrivée des militaires au pouvoir, au lendemain du coup de force, le ministre de l’économie nouvellement investi et son staff, avaient auditionné près d’une dizaine de postulants au poste de DG des douanes. Les impétrants avaient été soumis à un exercice inédit dans ce corps paramilitaire. Non seulement, ce fut historique dans toute la haute administration mais il était surtout question de privilégier la transparence et l’équité, gage de bonne gouvernance.
Le dialogue national d’Agondjé était l’occasion d’aborder la problématique du choix qualitatif aux fonctions publiques sans appartenance préalable aux cercles ésotériques, philosophiques, homosexuels, mafieux… Une sale pratique qui a court depuis les années 60 et à laquelle il faudrait tordre le coup.
Le pays mue, mutons avec, au risque de renouveler les pratiques de l’avant 30 août 2023. Que des pans entiers de postes stratégiques soient soumis à candidature. Un grand oral en somme à l’effet de savoir quelle vision, quelle stratégie, peut faire quoi avec qui, quoi et comment…
‘’L’égalité pour tous’’ dont on parle tant dans les discours insipides ne doit pas être un vain mot, quel que soit le régime en place, cela doit être une vertu, une culture à promouvoir.
Timothée Mémey
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