En à peine trois mois d’existence, l’UDB, l’Union démocratique des bâtisseurs, le parti créé en juillet dernier par le président Brice Clotaire Oligui Nguema devient désormais la première formation politique au Gabon, après avoir remporté la majorité absolue aux élections législatives et locales des 27 septembre et 12 octobre dernier. Mais derrière cette vague verte udbiste se cache en réalité une recomposition du paysage politique gabonais qui n’en est pas vraiment une.
En plus des 103 députés sur les 145 que compte l’Assemblée nationale gabonaise, l’Union démocratique des bâtisseurs rafle également toutes les mairies et départements du pays. C’est donc un raz-de-marée électoral que s’est offert ce parti pourtant novice de seulement trois mois d’existence. Mais novice peut-être pour son jeune âge, car à y regarder de très près, cette victoire fleuve est avant tout celle des transfuges du PDG, Parti démocratique gabonais et qui s’étaient pour l’essentiel déjà présentés dans leurs circonscriptions respectives, sous la bannière de leur parti en août 2023, dans le cadre des élections générales qui avaient vu la victoire trouble d’Ali Bongo Ondimba, l’ex-président déchu par Oligui Nguema. Ali Bongo tombé, inquiets d’être mis au banc de la mangeoire par le vent impétueux du coup d’Etat du 30 août, ces militants de circonstance, idéologues du ventre, pris par un vaste mouvement de palinodie, n’ont pas hésité de claquer la porte du PDG, avant de faire allégeance et de rejoindre le parti du nouvel homme fort du pays, Brice Clotaire Oligui Nguema, dont ils ne tarissent désormais plus d’éloges et autres qualificatifs à la gloire du chef, un peu comme ils le faisaient avec Ali Bongo.
UDB-PDG : derrière l’alliance, la stratégie de la fragilisation
Conscient de sa jeune existence dans le landerneau politique gabonais, l’UDB créée en juillet dernier n’a certainement pas voulu prendre le risque de surfer sur de nouveaux acteurs encore inconnus du grand public, surtout face à un PDG qui avait encore un maillage territorial important dans le pays. La stratégie a donc été de collaborer avec le PDG dans une sorte de camaraderie électoraliste, tout en le fragilisant de l’intérieur, puisque dans la plupart des cas, les candidats UDB étaient face à leurs anciens camarades restés au PDG soit par conviction, soit par calcul politique.
Une recomposition dans la continuité
Seulement, même en choisissant de débaucher les militants transfuges du PDG pour mieux s’imposer comme le plus important parti politique au Gabon, l’Union démocratique des bâtisseurs prend le risque d’une recomposition du paysage politique qui se nourrit de la continuité, contrairement à l’avis majoritairement exprimé lors du dialogue politique organisé en 2024 par Brice Clotaire Oligui Nguema lui-même. Un dialogue qui avait opté pour la mise au banc du Parti démocratique gabonais auquel les participants avaient imputé la responsabilité du sous-développement du Gabon. Mais la realpolitik aidant, l’UDB n’ayant pas les moyens de s’affirmer sur le terrain a donc décidé de s’allier au “diable”, un allié encombrant qui vient de lui offrir une si grande victoire de contrôler désormais les deux chambres du parlement, les conseils municipaux et départementaux du pays. Avec une majorité aussi large, et sachant le PDG désormais en minorité, l’UBD aura-t-elle besoin de cet allié tant décrié ? Si le PDG résiste avec 16 députés, relégué au deuxième rang des partis politiques, le temps d’une législature, sa disparition n’est plus qu’une question de temps et les prochaines échéances électorales pourraient sonner la fin des haricots.
Leno Koleba
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