Tout a commencé avec une affaire de répartition des étals au marché de Lambaréné, le chef-lieu de la province du Moyen-Ogooué. Le maire du 2e arrondissement de cette ville a cru bon, sûrement guidé par l’appât du gain, d’attribuer aux commerçantes d’origine étrangères l’essentiel des étals du nouveau marché du quartier Isaac, à peine inauguré par le chef de l’Etat.
Non contente de la manière dont le maire a procédé, vu que les commerçantes gabonaises n’avaient plus de place où vendre dans ce marché, une compatriote qui se dit influenceuse s’en est vertement prise aux commerçantes étrangères, particulièrement béninoises, et au maire du 2e arrondissement de la ville où a évolué le Dr Schweitzer, c’est du moins ce qu’on peut voir dans la vidéo à l’origine de la foire d’empoigne entre Gabonais et Béninois. Pis, la décision prise le lendemain en Conseil des ministres visant à prioriser un certain nombre de petits commerces informels d’abord et avant tout aux nationaux a exacerbé les tensions. Cette décision souveraine du gouvernement gabonais a suscité sur la toile des réactions de désapprobation en chaine pour bon nombre de panafricanistes ou prétendus tels, notamment nos plus proches voisins du côté du Nord. Ainsi donc, les Béninois et nos voisins du Continent se sont ligués pour traiter les Gabonais et son président de tous les noms d’oiseaux. Une ingratitude sans commune mesure. Ce, d’autant plus que les plus virulents dans la dénonciation sont ceux-là mêmes qui ont de gros intérêts dans notre pays. S’ils avaient voulu attiser la haine pour susciter des réactions négatives du gouvernement et du peuple gabonais pour nuire aux intérêts de leurs compatriotes, ils ne s’y prendraient pas autrement.
Au demeurant, il n’y a pas que les ressortissants du Continent et les Béninois qui se sont montrés désobligeants. Le comportement de certains Gabonais n’est pas non plus irréprochable. A commencer par l’influenceuse dont les propos à l’origine du grabuge ont été peu courtois. Il y a également le délégué spécial du 2e arrondissement qui n’a pas su gérer les susceptibilités, préférant se livrer à un exercice de communication exempt de toute sagesse sur la place publique qui plus est, en dénigrant ses propres compatriotes qui pour lui, n’ont pas les possibilités financières pour garantir aux populations les denrées alimentaires dont elles ont besoin. Oubliant sans doute que le Gabonais d’hier n’est plus celui d’aujourd’hui.
N’empêche qu’on ne peut pas balayer d’un revers de la main certains reproches qui nous sont faits par les étrangers sans les analyser en profondeur. Prenons l’exemple de la pêche. Au terme de la loi, il existe certaines zones de pêches exclusivement réservées aux nationaux. Mais que font certains ? Ils signent des accords avec des expatriés qui identifient leurs pirogues aux noms des Gabonais moyennant quelques kilos de poisson à chaque retour de pêche à défaut de recevoir quelques espèces sonnantes et trébuchantes. Lorsque le pêcheur béninois est arraisonné en mer, c’est le Gabonais qui se présente devant les autorités pour dire que ce dernier travaille pour lui ? Et cette pratique est connue de tout le monde y compris des autorités qui ferment les yeux. Il en est de même pour les forêts communautaires dans le domaine forestier. Les Gabonais sont propriétaires des permis, mais les exploitants sont Chinois ou autres.
On veut bien que les Gabonais prennent conscience de ce qu’ils doivent prendre en main les rênes de leur économie, mais cela ne doit pas être seulement discursif, il faut des actes forts, à commencer par le changement des mentalités.
Tout bien considéré, le clash Gabon-Bénin-Cameroun a eu le mérite de révéler au grand jour le degré d’animosité que certains vouent au Gabon. Et comme par hasard, ce sont les ressortissants de deux pays avec qui le Gabon a eu par le passé des altercations qui ont été les plus virulents. Tristes retour de vieux démons ! Pourvu que les Gabonais au sortir de ce clash aient pris conscience de la nécessité de prendre en main leur destin. Là, c’est une autre histoire.
Floyd Mathody
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