Au lendemain du coup d’Etat du 30 août 2023, les militaires regroupés au sein du CTRI avaient annoncé, par le canal du chef de file de cette nébuleuse lors de son discours d’investiture, la nécessité de faire table –rase du passé en éradiquant, à travers la restauration totale des institutions, les pratiques à l’origine de la décrépitude du pays durant le règne d’Ali Bongo Ondimba.
Ces déclarations de l’étoilé en chef avaient suscité en leur temps l’adhésion de plus d’un Gabonais et soulevé l’enthousiasme d’une grande partie de la population, à peine sortie de quatorze (14) années d’une dictature exemplaire.
Aussi, dans son adresse à la Nation le 30 août dernier marquant la commémoration du 64e anniversaire de l’Indépendance du Gabon, Brice Clotaire Oligui Nguema avait-il, fort judicieusement, réitéré son ambition profonde de construire un nouveau Gabon à travers l’enracinement de notre pays dans l’Etat de droit.
Reste que dans les faits, l’État de droit en question relève encore aujourd’hui du domaine discursif et de l’utopie, vu que celui-ci tarde à prendre forme à en juger par la persistance des pratiques blâmables ayant conduit le pouvoir d’Ali Bongo à la déchéance mais qui, sous le CTRI ne cessent de poursuivre leur expansion. Comme en témoigne l’accaparement abusif de parcelles appartenant aux agents d’Olam par des squatters dont nombreux ont été identifiés comme étant des responsables haut placés au sein des instances dirigeantes du pays. L’accélération des travaux à un rythme effréné est la preuve, s’il en est, que ceux qui se sont installés frauduleusement sur ce site ne sont pas dépourvus de moyens.
Sinon comment comprendre que des individus n’ayant aucun document administratif se permettent-ils de construire dans un terrain qui n’est pas le leur qui plus est, défient l’autorité de l’Etat ?
Rappel des faits.
En 2019, en effet, la société Olam Gabon a acquis les parcelles no 115 et 116 de la section YQ1 du plan cadastral d’Akanda auprès de la Société nationale immobilière (SNI) qui en était le propriétaire en vue de les distribuer à ses employés de Gsez, Gsez Air Port, NOIP et OMP tous issus du groupe Olam.
Seulement voilà, au moment d’occuper leurs terrains, quelle n’a pas été la surprise des employésde voir que les parcelles qui leur ont été attribuées après s’être acquittés des droits d’occupation auprès de leur employeur étaient occupées par des squatters parmi lesquels figuraient des individu issus de l’actuelle classe dirigeante.
Conscients de ce que cet espace territorial leur revenait de droit, les employés des sociétés suscités ont saisi l’ANUTTC qui a diligenté une enquête sur le terrain. Après celle-ci, il n’y avait aucun doute que le terrain est la propriété du groupe Olam qui l’a cédé à ses employés. L’agence après la conclusion de son enquête n’a pas eu d’autres choix que d’enjoindre les occupants illégaux de cesser les travaux.
Etat voyou
Bien que dissuadés par l’organe étatique en charge de la gestion du foncier dans notre pays, les squatters les ont envoyés paître. Plus audacieux, ils ont saisi le tribunal administratif pour tenter de se donner bonne conscience. Une tentative improductive étant donné que leur requête a tout simplement été jugée irrecevable parce que les plaignants ne disposaient d’aucun droit sur ce site.
En dépit des multiples condamnations, les occupants illégaux s’obstinent à poursuivre leurs constructions. Défiant par la même occasion l’autorité de l’Etat incarnée par les tribunaux et les administrations en charge de la gestion du foncier au Gabon. Une telle entreprise ne peut être que l’œuvre de gens puissants ou prétendus tels. On doute fort que des gens ordinaires puissent oser défier la puissance publique à ce point s’ils ne sont pas eux-mêmes dépositaire d’une parcelle de l’autorité de l’Etat. Cela ne peut être donc que l’œuvre de personnalités haut placées dans l’échelle sociale.
Il n’empêche que le collectif des employés du groupe Olam a, par la voix de son porte-parole, Clarisse Nzambi, fait part samedi dernier au cours de la conférence de presse qu’elle a animée , que les personnalités politiques (le président de la Transition, le Premier ministre, le ministre de la Justice, le ministre de l’Habitat) et administratives du pays ont été saisies pour qu’elles puissent apporter une solution à ce problème qui heurte frontalement l’Etat de droit garant du vivre ensemble et constitue un mauvais exemple pour les autorités de la Transition. Surtout qu’on parle même de disparition des dossiers y afférents au palais de justice. Le ministre de la Justice Garde des Sceaux qui a été saisi sur les cas de disparitions des dossiers se montre fort curieusement muet face à ce qui ressemble fortement à la présence d’une mafia comprador tapis au sein du palais de justice de Libreville. Son mutisme est-il un signe de capitulation ou de complicité. On se le demande.
Toujours est-il que le collectif reste déterminé à exercer ses droits en rentrant en possession de leur titre foncier, que la légalité prévale sur tous les autres aspects qui ramènent le pays un bond en arrière et le placent non plus sur les rails de l’Etat de droit mais bien malheureusement sur ceux d’un Etat voyou.