Visage rayonnant, doux regard, sourire radieux, voix chevrotante qui nous rappelle celles des divas issues de l’univers Jazz, plastique bien moulée du haut de son 1m65, la chanteuse compositrice et interprète gabonaise Nanou, peut être présentée comme une valeur sûre de la faune artistique gabonaise tant ses exploits scéniques séduisent. Ce requin qui a écumé les studios d’enregistrement aux côté de D Jazz en 2018, est une choriste à la base avant qu’elle se lance corps et âme dans la chanson bonifiée par ses excursions musicales chez Bantu Jazz du pianiste gabonais Frédéric Ngassita et chez Eben Voice, qui ont forgé son identité artistique.
Sa trajectoire, toute tracée, s’inscrit sur le registre afro-zook avec quelques influences afro-beat (afro-Jazz) modernes incarnées par la nouvelle pépinière, les avatars de Féla Kuti, Tony Allen, Manu Dibango… que sont Buena Boys, Ten’s, Davido….
Deux singles à son répertoire, disponibles sur toutes les plateformes numériques dont Youtube : ‘’mon choix’’ et ‘’Amour’’. « Malgré mes nombreuses influences, je tiens à garder ma propre identité, j’ai pas de gourous, c’est un don, je fais partie des artistes autodidactes qui se sont professionnalisés. », glisse-telle doucement.
En 2018, elle se fait remarquer dans Eben Voice. C’est avec cette troupe vocale professionnelle qu’elle participe aux ‘’jeux africains’’ au Maroc. Avec ce même groupe, elle sort demi-finaliste de ‘’Voice Afrique francophone’’ en Afrique du sud où elle interprètera ‘’seven seconds’’ de Yousou N’Dour en feat avec Neney Cherie.
Les nouvelles tendances chez les jeunes artistes d’aujourd’hui, qui ont la phobie de se fossiliser comme beaucoup de leurs prédécesseurs, c’est de chanter en anglais pour mieux s’exporter. D’autres, en revanche, font le choix de chanter dans les langues du terroir. C’est le cas de Nanou. « Pas besoin de chanter en Anglais pour s’exporter, la musique est un langage universel, on peut chanter dans sa langue et s’exporter », argumente gentiment l’artiste.
A 11 ans, comme tous les jeunes de son âge, elle est déjà une férue de musique R&B et hip-hop, Rap, des courants musicaux de son époque. Son père, ingénieur en génie civile et qui ignore tout des penchants artistiques de sa fille, tient absolument qu’elle pratique du sport. Il l’inscrit aux cours de judo au Lycée Léon Mba. « Je séchais les cours de judo pour aller suivre des cours de chorale du club d’anglais du lycée, à l’époque, située tout juste à côté de la salle de judo », se souvient-elle.
Au Gabon, la musique, ou les arts en générale, selon des idées reçues, ne nourrissent pas leurs hommes. D’où l’inquiétude des parents de voir évoluer leurs rejetons dans un environnement aussi précaire. Ce qui explique sans doute que certains tuteurs deviennent des facteurs bloquants à l’éclosion d’un don artistique naissant chez leurs mômes.
« Les parents doivent respecter le choix de leurs rejetons, qu’ils choisissent la musique, les arts plastiques, les arts dramatiques ou sportifs, il ne faut pas qu’ils étouffent des dons, sinon on aurait jamais eu les Marcelin Minko Mi-Nzé, Georges Mbourou, Mbapé, Obame Eyang, Lybeck et Fréderic Gassita » (dont le père, pour la petite histoire, le Pr Ngassita, le prédestinait à une belle carrière de médecin). Suggère l’artiste.
« A vous dire vrais, je vis pleinement de mon art, poursuit Nanou, je fais rien d’autre que chanter, dans des cabarets de la place et des cœurs en live et en studio, c’est ainsi que je gagne ma vie». Se réjouit-elle.
Si cette diplômée en master logistique et transport vit pleinement de son art, ce n’est pas le cas pour bon nombre de ses coreligionnaires qui vivent d’expédients. « Les conditions de vie des artistes, le BUGADA est à pied d’œuvre, le statut de l’artiste, c’est déjà une avancé, je crois que les lignes bougent », lance, optimiste, Nanou. Le prochain album encore en gestation sera chanté en langues issangu et en myènè. Deux langues du terroir.
Laure-Patricia Manevy