Le 17 août est, dit-on, la fête de l’indépendance du Gabon qui s’est libéré du joug colonial depuis le 17 août 1960. Une fleur dont on dit faite aux indigènes Gabonais par un certain général De Gaulle qui distribuait les indépendances comme des bouts de pains. De quelle indépendance parle-t-on, entre nous ? Il serait plutôt aisé de parler de fête de la capitulation puisque le pays reste toujours sous la domination métropolitaine qui pille allègrement toutes ses richesses.
C’est le moment choisit par le Gabon dit libéré pour nous diffuser sur les surfaces de nos petits écrans des archives montrant les tronches de Léon Mba et Albert Bernard Bongo, prononçant des discours dans une approximation langagière déconcertante et un accent ethnique très prononcé. Aucune trace des discours de Paul-Marie Yembit, complètement effacé de l’histoire du Gabon. Pas même aux Archives nationales qui ne conservent qu’une rare photo de celui qui fut pourtant le Vice-président de la République sous Léon Mba. Bourré d’un complexe d’imposture, Bongo a tout fait pour noircir et humilier ce commis de l’Etat. Les discours de Léon Mba, celui dont il était le Vice-président, figurent bel et bien dans les archives, ceux du Directeur de cabinet de Léon Mba, Albert Bernard Bongo aussi. Sauf ceux, par extraordinaire, de Paul Marie Yembit.
Les jeunes générations retiendront de lui uniquement une caricature savamment montée, une histoire falsifiée, cousue de fil blanc par Albert Bernard Bongo qui tenait à l’expurger de l’histoire du pays.
Ce qu’on retient de Paul Marie Yembit, ce sont des inventions savantes relayées par quelques abrutis : « Patateux, ignameux, soleil agnangoulé, manioqueux… » Si on connait le nom du commanditaire de cette lamentable comédie, on recherche encore celui du cancre qui a mis tout ça en scène.
Dans un ouvrage, ‘’ biographie d’un présidentiable’’ paru aux éditions Mekambi en France, Pierre Louis Agondjo Okawé, alors jeune avocat et universitaire, fraichement rentré de l’Occident, affirmait n’avoir pas connu le Yembit que le système Bongo a ‘’boufonnisé ‘’. Il se souvenait, plutôt, d’un Yembit, traditionnaliste, très érudit dans la pure tradition bantu. Dimeima Kombila Itsitsa, qui a commis un ouvrage biographique sur ce personnage historique : ‘’un homme, une histoire’’, qui retrace la vie de Paul-Marie Yembit, récuse toute la légende réductrice faite autour du personnage.
« Il a travaillé sous la coloniale comme gérant de la Société du Haut Ogooué (SHO), les colons pouvaient confier la gestion de leur société à un illettré ? », s’interroge l’auteur.
« Dans les années 40, il fait ses études à l’école catholique saint François de Lambaréné jusqu’en classe de CM2, poursuit l’auteur, Il est admis au concours de formation des cadres de l’administration coloniale à Brazzaville, ne pouvant rallier la capitale de l’Afrique Equatoriale française (AEF), en raison de ses douleurs à ses membres inférieurs, il est engagé en qualité de gérant dans la société du Haut Ogooué (SHO), l’homme a occupé de grandes fonctions, Vice-Président, Ministre de la Justice garde des sceaux, ministre de la Fonction publique… ».
Lorsqu’éclate le coup d’Etat contre Léon Mba en 1964, Paul Marie Yembit se trouve dans son village moussambou dans le cadre d’un séjour privé, il va finalement rallier Mouila pour solliciter l’intervention française.
Voyant en Yembit un rival et un adversaire de taille qui constituait une menace pour ses ambitions présidentialistes, Bongo accuse Yembit d’avoir fomenté un complot. Pendant 6 mois, il est gardé à vue au camp Roux avant d’être placé en résidence surveillée d’abord à Mouila puis dans son village assortie d’une interdiction de quitter les lieux.
Les étoilés du CTRI qui disent restaurer les institutions, la dignité des Gabonais, pour un devoir de mémoire, doivent réécrire l’histoire falsifiée de Paul Marie Yembit, même à titre posthume.
Théaime
